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Le brahmane Pingalakoccha, Koccha le Brun, était nommé ainsi en raison de la couleur de sa peau.
Ainsi ai-je entendu.
En ce temps-là le Bienheureux séjournait, près de Sāvatthi, dans le parc Anāthapiṇḍika du bois Jéta.
Le brahmane Piṅgalakoccha vint trouver le Bienheureux. Il échangea en arrivant des paroles courtoises avec le Bienheureux, et il conclut leur dialogue aimable et mémorable en s’asseyant convenablement. Une fois bien assis, le brahmane Piṅgalakoccha demanda au Bienheureux :
— Il y a, Vénérable Gotama, des ascètes et des brahmanes qui ont une communauté ou un groupe dont ils sont les maîtres, qui sont intelligents et célèbres, qui jouent le rôle de guides et sont considérés par la foule comme des gens de bien, tels Purana Kassapa, Makkhali Gosāla, Ajita Kesakambali, Pakudha Kaccāyana, Sañjaya Belatthaputta ou Nātaputta le sans-lien. Ont-ils tous la connaissance directe comme ils l’affirment ? Ou aucun d’entre eux ne l’a-t-il ? Ou certains ont-ils cette connaissance directe alors que d’autres ne l’ont pas ?
— Il suffit, brahmane. Laissons de côté cette question(*). Je vais en revanche te montrer la réalité. Écoute, brahmane, et fais bien attention, je vais parler.
— Bien, vénérable, répondit le brahmane.
Le Bouddha refuse de se laisser entraîner dans une discussion qui ne concerne en rien le but de la vie sainte.
Et le Bienheureux dit ceci :
— Suppose, brahmane, qu’un homme ait besoin de cœur d’arbre. Il cherche un tel cœur, part à sa recherche, mais néglige le cœur d’un grand arbre debout qui contient un tel cœur, néglige aussi son aubier, son écorce et les exfoliations de son écorce. Il coupe les rameaux et les emporte en croyant avoir du cœur d’arbre. Un homme doué d’une bonne vue dira en le voyant : « Cet honorable ami ne connaît rien au cœur des arbres, à leur aubier, à leur écorce, à leurs exfoliations et à leurs rameaux. Alors qu’il avait besoin de cœur d’arbre, qu’il en cherchait, qu’il était parti à sa recherche, il a négligé le cœur d’un grand arbre debout, négligé aussi son aubier, son écorce et les exfoliations de son écorce, coupé les rameaux et les a emportés en croyant que c’était du cœur d’arbre. Il ne pourra pas réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur ».
Suppose maintenant, brahmane, qu’un autre homme ait besoin de cœur d’arbre. Il cherche un tel cœur… mais néglige le cœur d’un grand arbre debout, néglige aussi son aubier et son écorce, coupe les exfoliations de l’écorce et les emporte en croyant avoir du cœur d’arbre. Un homme doué d’une bonne vue dira en le voyant : « Cet honorable ami ne connaît rien au cœur des arbres… il a négligé le cœur du grand arbre debout, négligé aussi son aubier et son écorce, coupé les exfoliations et les a emportées en croyant que c’était du cœur d’arbre. Il ne pourra pas réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur ».
Suppose ensuite, brahmane, qu’un troisième homme ait besoin de cœur d’arbre. Il cherche un tel cœur… mais néglige le cœur d’un grand arbre debout, néglige aussi son aubier, coupe l’écorce et l’emporte en croyant avoir du cœur d’arbre. Un homme doué d’une bonne vue dira en le voyant : « Cet honorable ami ne connaît rien au cœur des arbres… il a négligé le cœur du grand arbre debout, négligé aussi son aubier, coupé son écorce et l’a emportée en croyant que c’était du cœur d’arbre. Il ne pourra pas réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur ».
Suppose encore, brahmane, qu’un quatrième homme ait besoin de cœur d’arbre. Il cherche un tel cœur… mais néglige le cœur d’un grand arbre debout, coupe son aubier et l’emporte en croyant avoir du cœur d’arbre. Un homme doué d’une bonne vue dira en le voyant : « Cet honorable ami ne connaît rien au cœur des arbres… il a négligé le cœur du grand arbre debout, coupé son aubier et l’a emporté en croyant que c’était du cœur d’arbre. Il ne pourra pas réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur ».
Suppose enfin, brahmane, qu’un dernier homme ait besoin de cœur d’arbre. Il cherche un tel cœur… coupe le cœur d’un grand arbre debout et l’emporte en sachant que c’est du cœur d’arbre. Un homme doué d’une bonne vue dira en le voyant : « Cet honorable ami connaît bien le cœur d’arbre… il a coupé le cœur du grand arbre debout et l’a emporté en sachant que c’était du cœur d’arbre. Et il peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur ».
De même, brahmane, voici un individu qui est passé du foyer au sans-foyer par confiance : « Je suis affecté par la naissance, le vieillissement, la mort, les chagrins, les lamentations, les douleurs, les insatisfactions et la détresse. Je souhaite que vous me montriez, ne serait-ce qu’un peu, comment mettre fin à toute cette masse de malheurs ». Quand il a quitté son foyer, il s’attire des dons, des marques de respect et des éloges. Il y prend plaisir, et son but est atteint. Il se vante de ces dons, de ces marques de respect et de ces éloges, et méprise les autres : « Je reçois, moi, des dons, des marques de respect et des éloges, alors que les autres moines sont ignorés et dédaignés ». Il n’aspire pas à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à ces dons, à ces marques de respect et à ces éloges, il ne fournit pas d’efforts, reste enlisé et relâché. Je déclare que cet individu est comparable au premier des hommes qui cherchent du cœur d’arbre… et qui ne peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur d’arbre.
Voici, brahmane, un autre individu qui est passé du foyer au sans-foyer par confiance : « Je suis affecté par la naissance, le vieillissement, la mort, les chagrins, les lamentations, les douleurs, les insatisfactions et la détresse. Je souhaite que vous me montriez, ne serait-ce qu’un peu, comment mettre fin à toute cette masse de malheurs ». Quand il a quitté son foyer, il s’attire des dons, des marques de respect et des éloges. Mais il ne s’en satisfait pas, et son but n’est pas atteint. Il ne se vante pas de ces dons, de ces marques de respect et de ces éloges, et ne méprise pas les autres. Mais il aspire à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures aux dons, aux marques de respect et aux éloges, il fournit des efforts, ne reste pas enlisé ni relâché, il entreprend de parfaire sa vertu. Mais il se satisfait d’une vertu parfaite, son but est alors atteint. Il se vante de sa vertu parfaite et méprise les autres : « Je suis discipliné, moi, j’ai une bonne nature, alors que les autres moines sont indisciplinés et de nature mauvaise ». Il n’aspire pas à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à cette vertu parfaite, il ne fournit pas d’efforts, reste enlisé et relâché. Je déclare que cet individu est comparable au deuxième des hommes qui cherchent du cœur d’arbre… et qui ne peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur d’arbre.
Voici, brahmane, un troisième individu qui est passé du foyer au sans-foyer… il ne se satisfait pas des dons, des marques de respect et des éloges… il ne se satisfait pas non plus d’une vertu parfaite, son but n’est pas encore atteint. Il ne se vante pas de sa vertu parfaite et ne méprise pas les autres. Mais il aspire à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à la vertu parfaite, il fournit des efforts, ne reste pas enlisé ni relâché, il entreprend de parfaire sa concentration. Mais il se satisfait d’une concentration parfaite, son but est alors atteint. Il se vante de sa concentration parfaite et méprise les autres : « Je suis concentré, moi, et mon attention est bien focalisée, alors que les autres moines ne sont pas concentrés et leur attention se disperse ». Il n’aspire pas à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à cette concentration parfaite, il ne fournit pas d’efforts, reste enlisé et relâché. Je déclare que cet individu est comparable au troisième des hommes qui cherchent du cœur d’arbre… et qui ne peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur d’arbre.
Voici, brahmane, un quatrième individu qui est passé du foyer au sans-foyer… il ne se satisfait pas des dons, des marques de respect et des éloges… il ne se satisfait pas non plus de sa vertu parfaite… il ne se satisfait pas davantage de sa concentration parfaite, son but n’est pas encore atteint. Il ne se vante pas de sa concentration parfaite et ne méprise pas les autres. Mais il aspire à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à la concentration parfaite, il fournit des efforts, ne reste pas enlisé ni relâché, il entreprend de connaître et de voir. Mais il se satisfait de connaître et de voir, son but est alors atteint. Il se vante de connaître et de voir, et méprise les autres : « Je connais, moi, et je vois, alors que les autres moines ne connaissent pas et ne voient pas ». Il n’aspire pas à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à cette connaissance-vision, il ne fournit pas d’efforts, reste enlisé et relâché. Je déclare que cet individu est comparable au quatrième des hommes qui cherchent du cœur d’arbre… et qui ne peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur d’arbre.
Voici enfin, brahmane, un individu qui est passé du foyer au sans-foyer… il ne se satisfait pas des dons, des marques de respect et des éloges… il ne se satisfait pas non plus d’une vertu parfaite… il ne se satisfait pas non plus d’une concentration parfaite… il ne se satisfait pas davantage de connaître et de voir, son but n’est pas encore atteint. Il ne se vante pas de connaître et de voir, et ne méprise pas les autres. Mais il aspire à voir de ses propres yeux des réalités meilleures, supérieures à la connaissance-vision, il fournit des efforts, ne reste pas enlisé ni relâché.
Et que sont, brahmane, les réalités meilleures, supérieures à la connaissance-vision ? Ici, brahmane, c’est seulement en s’isolant du sensoriel, en s’isolant des agents pernicieux que le moine accède au premier jhāna… au deuxième jhāna… au troisième jhāna… au quatrième jhāna… au domaine de l’espace infini… au domaine de la conscience infinie… au domaine du néant… au domaine sans perception ni non-perception(*), et il y demeure. Voilà ce que sont les réalités meilleures, supérieures à la connaissance-vision.
Voir la formule complète : Formules fréquentes
De plus, brahmane, en transcendant totalement le domaine sans perception ni non-perception, le moine accède à l’arrêt des perceptions et du ressenti, il y demeure et il élimine les contaminations au moyen d’une vision sagace. Voilà une autre réalité meilleure, supérieure à la connaissance-vision. Telles sont les réalités meilleures, supérieures à la connaissance-vision.
Je déclare, brahmane, que cet individu est comparable à l’homme qui a besoin de cœur d’arbre, qui en cherche et va à sa recherche, qui coupe le cœur du grand arbre debout, qui l’emporte en sachant qu’il s’agit du cœur de l’arbre, et qui peut réaliser ce qu’il devait fabriquer avec ce cœur d’arbre.
Ainsi, brahmane, la vie sainte n’a pas pour but l’avantage de recevoir des dons, des marques de respect ou des éloges, ni l’avantage d’une vertu parfaite, ni l’avantage d’une concentration parfaite, ni l’avantage de connaître et de voir. Mais c’est la Délivrance spirituelle inébranlable qui constitue le but de la vie sainte, qui en est le cœur et l’achèvement.
Ainsi parla le Bienheureux, et le brahmane Pingalakoccha s’exclama :
— C’est merveilleux, honorable Gotama ! C’est merveilleux, honorable Gotama ! C’est comme si l’honorable Gotama avait redressé ce qui penchait, avait révélé ce qui était caché, avait montré le chemin à l’égaré, et avait apporté une lampe dans l’obscurité pour que ceux qui ont des yeux voient ! C’est ainsi de plusieurs façons que l’honorable Gotama a exposé l’enseignement. Je cherche refuge auprès de l’honorable Gotama, du Dhamma et du Sangha. Que l’honorable Gotama me considère dès à présent comme un upāsaka qui gardera le refuge tant qu’il lui restera un souffle de vie. »
Origine : Enseignements et discussions entre Bouddha, ses disciples, ses antagonistes… (Nord de l’Inde actuelle)
Date : Ve siècle avant notre ère
Traducteur : Christian Maës
Mise à jour : 25 févr. 2011