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Introduction à l’entraînement au développement de vipassanā, suivie d’une présentation très pragmatique de la méthode.
satipaṭṭhāna est simplement connaître ce qui est là au moment où cela apparaît. Ce n’est pas une technique, car il ne s’agit pas d’un exercice. C’est simplement le fait d’observer les phénomènes tels qu’ils apparaissent. Aucun artifice ne peut être utilisé pour y parvenir.
vipassanā est simplement la vision qui résulte du fait de porter son attention sur la réalité. Le fait de porter son attention sur la réalité n’est pas une méditation, n’est pas une réflexion et encore moins une investigation.
Maintenant, essayez pendant 1 minute de rester assis et de ne rien faire, de ne pas méditer, de ne pas réfléchir, de ne pas vous concentrer, de ne pas porter votre attention en particulier sur ceci ou sur cela. Essayez simplement de connaître tout ce qui apparaît à la conscience, à l’instant où cela apparaît et pas plus longtemps que cela apparaît. Essayez de faire cela pendant une petite minute. Pas de respiration, pas d’objet particulier sur lesquels vous portez votre attention, simplement l’objet le plus volumineux, le plus proéminent, la chose la plus grosse, la plus visible à la conscience, vous l’observez pour ce qu’elle est. Essayez de faire cela juste une minute…
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Je doute que vous ayez réussi à rester immobile, assis, à contempler la réalité et à voir tout ce qui apparaît à la conscience. C’est très peu probable ! Sauf évidemment, si vous avez déjà un bon entraînement.
Le problème est que la théorie est une chose, mais la pratique en est une autre. D’autant plus que, vipassanā n’est pas une pratique, pas au sens habituel du terme. Comment pouvons-nous arriver à développer cette habitude, cet entraînement si nous n’avons pas au moins au départ un point de repère ? C’est le fouillis complet. On ne sait pas du tout ce qu’il faut regarder, ce qu’il faut observer, on est assis là, on a entendu dire : « Voilà, vous n’avez qu’à rester assis et à observer tout ce qui vient. » C’est très difficile d’y arriver.
Du temps de Bouddha, apparemment, c’était possible. Il est arrivé plus d’une fois que certaines personnes, du seul fait d’entendre ces instructions, parvinssent à la réalisation complète. De nos jours, il semblerait que ça ne fonctionne plus comme cela. C’est la raison pour laquelle le génie humain, l’intelligence humaine a réussi à élaborer une certaine approche plus pratique, plus pragmatique de la chose. Notamment, grâce au développement de ce qu’on peut appeler une méthode. Il ne s’agit pas d’une technique. C’est simplement une méthode, c’est-à-dire une approche.
L’idée est la suivante : Nous faisons ce que Bouddha enseigne, nous portons notre attention sur tout ce qui vient ; les sons, les idées, les visions, les odeurs, les goûts et les touchers. Comme l’esprit va avoir tendance à se disperser et à se perdre complètement, nous allons choisir parmi toutes ces choses qui apparaissent à la conscience, un objet qui est proéminent. Un objet facile à voir, assez volumineux, assez lent, assez grossier (du moins dans un premier temps) et qui nous accompagne toujours. Cet objet ne peut bien entendu se trouver que dans notre corps.
Ainsi Bouddha encourage-t-il souvent (dans les écritures) à la contemplation du corps, mais pas en tant que conception. Il ne s’agit pas de contempler la respiration qui n’est qu’une conception, de contempler l’épaule, la tête, les cheveux ou les dents qui ne sont que des conceptions. Ce ne sont que des vérités conventionnelles. À l’intérieur de l’activité du corps, ce qu’il nous faut observer est ce qui est réel. Ce qui est réel est tout ce qui change, tout ce qui bouge, tout ce qui est insatisfaisant et tout ce qui est vide de substance. C’est-à-dire tous les phénomènes de base, qui constituent ce qu’on appelle le corps, à savoir toutes les propriétés élémentaires de ce qu’on appelle le corps.
Parmi ces propriétés, il y en a toujours qui sont très faciles à observer lorsque le corps est en mouvement, lorsque le corps est en déplacement. Lorsque nous sommes assis, le corps est immobile. Donc, il ne nous reste qu’à trouver quelque chose qui bouge quand le corps est immobile. Quand nous sommes assis, il y a une chose qui bouge régulièrement, assez lentement, de manière assez grossière et visible, c’est le ventre. Peu importe de savoir à quoi c’est dû, peu importe de savoir ce qui se passe lorsqu’il bouge, ce qui est intéressant est simplement de savoir qu’il y a ce mouvement, cette oscillation, cette non permanence. Nous portons notre attention sur le mouvement du ventre, le mouvement de l’abdomen, qui gonfle et qui dégonfle, qui monte et qui descend (peu importent les mots). Il va dans un sens et il va dans l’autre sens. Bien entendu, aussitôt qu’il y a quelque chose qui apparaît à notre esprit de plus clair, de plus bruyant, nous portons alors notre attention dessus, car il est hors de question de rester focalisé sur le mouvement de l’abdomen. Il s’agit de satipaṭṭhāna, du développement de l’attention dans l’instant, pas de samatha, pas du développement de la concentration dans la continuité.
Nous allons maintenant essayer pendant 1 minute de porter notre attention uniquement sur le MOUVEMENT du ventre. Si jamais il venait à se faire entendre un bruit, nous laissons de côté le mouvement et nous portons notre attention sur le bruit, sur le « entendre ». S’il y a une pensée, nous laissons tomber le mouvement de l’abdomen et nous portons notre attention sur la pensée (sans la suivre). S’il n’y a rien de proéminent, de particulier, ce qui est souvent le cas au début, alors nous continuons de porter notre attention sur chacune des alternances du mouvement de l’abdomen…
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Comme nous pouvons le constater, c’est déjà une approche plus facile, car au moins, nous avons quelque chose qui est là, sur quoi nous pouvons porter notre attention et qui est toujours là, que nous ne risquons pas de perdre. Seulement, lorsqu’il y a autre chose qui vient, il faut à ce moment aussi le connaître. Lorsqu’il n’y a rien de particulier qui vient, nous revenons au mouvement de l’abdomen.
Cet enseignement est parvenu jusqu’à nous on a presque envie de dire par miracle quand on voit le monde de déchéances dans lequel nous vivons, quand on voit le monde de spiritualités variées et diverses dans lequel nous vivons, quand on voit dans les librairies ou dans les bibliothèques, les étagères remplies de livres qui nous proposent tous des solutions « miracle » à nos problèmes. Par exemple : « Tel mantra, telle prière, telle récitation, tel gourou… peut vous amener à la fin de vos problèmes. »
À travers vingt-cinq siècles de folie humaine, à travers vingt-cinq siècles de croyances, d’opinions et d’enseignements, l’enseignement du moine Gotama est arrivé à nous, comme vous lisez ici, intact et immaculé.
Cela relève presque du miracle mais pourtant, ce n’en est pas un. C’est simplement dans la nature, c’est une nécessité, que fasse partie de la nature qui apparaît, la possibilité qu’elle cesse d’apparaître. C’est une nécessité naturelle, c’est une loi. C’est parce qu’il y a la souffrance nous dit le moine Gotama, qu’il existe la possibilité de la fin de la souffrance, tout simplement.
Ayant lu cela, qui est la parole du Parfait, je souhaite de tout cœur que vous puissiez avancer sur la voie du satipaṭṭhāna, c’est-à-dire sur la voie qui consiste à connaître la non permanence, qui consiste à connaître la souffrance, qui consiste à connaître l’absence d’en soi.
Je souhaite sincèrement que vous puissiez atteindre nibbāna, qui est la libération complète de l’emprise du monde, le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions possibles.
Origine : Enseignement délivré à Bagneux (France)
Auteur : Moine Sāsana
Date : 1999
Mise à jour : 16 janv. 2007